France, démonarchie et extrémisme syndical

La récente polémique sur le travail dominical des magasins Leroy Merlin et Conforama en Ile-de-France me donne l’occasion de parler d’un sujet qui me tient à cœur depuis que j’ai emménagé en Suisse : la démocratie.

La démocratie vue des Français

En France, on nous bassine dès le plus jeune âge sur notre belle démocratie. Dès l’école primaire, on nous parle de la Révolution française qui a donné au peuple le pouvoir qu’il mérite. Ainsi, c’est lui qui élit ses représentants qui gouverneront le pays et seront chargés de prendre les décisions qui répondent aux attentes et aux besoins du peuple.
Dans la théorie, c’est un mode de fonctionnement qui doit permettre à la majorité d’être pleinement satisfaite. Dans les faits, on en est parfois très loin et la polémique sur le travail dominical en est la parfaite illustration.

Pourquoi est-on donc si loin du modèle idéal ? Je vois 2 éléments de réponses, soulevés par notre affaire du travail dominical :

  1. La démocratie française n’est pas si démocratique que ça ;
  2. Les syndicats français sont bien trop puissants eu égard à leur représentativité.

La France démonarchique

Concernant la démocratie, j’ai pu constater durant ma courte vie de citoyen-électeur un gros malaise chez nous les Français : la plupart des gens ne votent pas pour un candidat mais contre un candidat.

Je me rappelle encore d’une discussion enflammée avec un camarade de classe au moment de la présidentielle de 2007. C’était entre les 2 tours. Sa position était qu’il fallait voter pour Ségolène pour ne pas laisser passer Nicolas. Personnellement, j’avais l’intention de voter blanc (ce que j’ai fait). C’est la position que j’ai soutenue face à lui et il ne comprenait pas.
Pourquoi j’ai voté blanc ? Parce que je ne me retrouvais dans aucun des 2 candidats et pour moi il n’y aurait en définitive pas de différences entre les 2. Même si je suis plutôt penché à gauche, ma seule orientation politique n’est pas une raison suffisante pour voter pour quelqu’un en qui je ne crois pas.
De plus, le vote blanc a pour moi le même poids qu’un vote pour un candidat – même si ce n’est malheureusement pas le cas dans la pratique (lien externe). Voter blanc, c’est signifier son refus des solutions proposées.

Bref, cette petite digression pour dire que beaucoup votent avant tout contre un candidat plutôt que pour son concurrent. Pour moi c’est un indice révélateur de la santé défaillante de notre belle démocratie. La raison pour laquelle les gens agissent ainsi, c’est qu’ils ne croient plus en leurs représentants.
Mes pensées vont même plus loin. Aujourd’hui, les Français n’élisent pas un président et son gouvernement, ils élisent un roi et sa cour.
Une fois les représentants élus, le peuple n’a qu’à subir les décisions politiques justes ou moins justes et n’a que rarement la possibilité de s’exprimer – et quand ça arrive, c’est pas toujours agréable pour le roi (lien externe). Des lois sont votées sans grande consultation et en résultent des grèves devenues un symbole national de la France pour l’ensemble des pays étrangers. Et c’est là que les syndicats débarquent.

Syndicalisme de l’extrême

L’autre sujet soulevé par les débats sur le travail dominical, c’est les syndicats.
Ces débats révèlent au grand jour le grand décalage entre la force des syndicats et leur représentativité dans les rangs des salariés.
Les syndicats sont en effet à l’origine du débat suite à leur tentative de faire fermer le dimanche les magasins incriminés. Mais dans leur éternelle « quête de justice pour les pauvres salariés exploités », ils ont oublié un détail : nombreux sont les salariés eux-même en demande de pouvoir travailler le dimanche.

Mais comment les syndicats peuvent-ils être autant à côté de la plaque vous demandez-vous ? Et bien peut-être tout simplement parce que seulement 7% à 8% des salariés sont syndiqués (lien externe). Ça veut donc dire qu’il y a potentiellement 93% des salariés qui peuvent être en désaccord avec la position des syndicats. Et c’est ce qui semble être mis en lumière par notre fameuse polémique du travail dominical.

Ce chiffre assez faible de syndiqués en France vous a peut-être aussi fait tiquer. Comment se fait-il qu’une part si faible – on parle de moins de 10% tout de même ! – ait autant de force politique et ait la capacité de pratiquement bloquer le pays ?
C’est une question à laquelle je n’ai pas de réponse. Et je suis d’autant plus interloqué en apprenant que la France est l’un des pays où il y a le moins de syndiqués (lien externe). À titre de comparaison, l’Angleterre ou l’Allemagne on respectivement 2 et 3 fois plus de syndiqués que chez nous ! Et malgré tout, la France est le pays où on entend le plus les syndicats…

Conclusion et ouverture

Le débat du travail dominical m’a donné l’occasion de partager ma vision de 2 sujets sur lesquels les Français peuvent travailler pour améliorer la société. Ce n’est qu’un avis personnel et je n’ai certainement pas la science infuse. Mais pour avoir la chance de voir depuis un peu moins d’un an un autre modèle de société en Suisse, je ne peux m’empêcher de constater les progrès à faire en France…

Sur le plan démocratique, les citoyens suisses sont en effet bien plus impliqués dans les décisions politiques. Très régulièrement, des votations sont organisées pour demander l’avis du peuple sur des proposition de nouvelles lois ou des changements de lois existantes.
Pour chaque votation, un document est envoyé à chaque citoyen dans lequel sont décrits les points importants du texte de loi, les argumentations des partisans et des détracteurs du projet, le tout complété par une copie du texte soumis au vote.
Pas plus tard que la semaine dernière, des votations pour 3 lois ont eu lieue sur le canton de Fribourg. Le document d’information « pesait » plus de 80 pages ! Et chaque année sont organisées plusieurs votations comme celle-ci !

Bref, la Suisse est un vrai modèle de démocratie dans lequel le peuple est investi. Quand je le compare à notre modèle français, je me rends compte que nous sommes en fait très loin de la démocratie qu’on nous vend à l’école et qu’il y a encore beaucoup de travail.